février 2015

accessibilité numérique
Actualités, Articles, Fournisseur d'accès, Internet contentieux, Publication

Moteurs de recherche : un statut d’intermédiaire technique

La Cour suprême de justice argentine a eu l’occasion de statuer pour la première fois sur le régime de responsabilité applicable aux moteurs de recherche référençant des contenus illicites sur internet. Dans cette affaire, un mannequin contestait la mise en ligne de photographies la représentant sur des sites à caractère pornographique référencés par les moteurs de recherche Google et Yahoo. Cette dernière avait choisi d’agir en justice à l’encontre des moteurs de recherche et non à l’encontre des auteurs des contenus illicites, estimant que ces derniers étaient responsables dans la mesure où ils organisaient et indexaient les informations selon leurs propres critères et disposaient par conséquent d’un pouvoir de contrôle sur ces contenus. Dans sa décision du 28 octobre 2014, la Cour de suprême justice réforme la décision de première instance et conteste cette position estimant que les moteurs de recherche ne peuvent être déclarés responsables en raison de la mise en ligne d’un contenu illicite apparaissant dans les résultats d’une recherche ainsi que sur des sites internet accessibles depuis les résultats de cette recherche. La juridiction suprême se prononce également sur le sort des contenus illicites apparaissant par le biais du service « Google Image thumbnails », lequel associe par défaut des images réduites aux résultats d’une recherche sur le moteur de recherche. Ces images sont destinées à donner davantage d’informations à l’internaute sur le contenu de l’URL. Selon la Cour suprême de justice, le moteur de recherche ne peut être déclaré responsable de l’apparition d’images illicites. Conformément à la loi et à la jurisprudence applicables en France et notamment la Loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004, la Cour suprême de justice estime qu’un moteur de recherche ne peut être tenu responsable des contenus illicites que s’ils ont été portés à sa connaissance et si ce dernier n’a pas agi promptement pour retirer ce contenu. Cette décision a le mérite de combler le vide juridique entraîné par l’absence de loi spécifique concernant le régime des intermédiaires techniques sur internet en Argentine. Elle pourrait être l’occasion d’initier un débat afin de réformer un droit encore en friche dans ce pays. Virginie Bensoussan-Brulé Caroline Gilles Lexing Droit Vie privée et Presse numérique

Actualités, Contrat, Informatique

Caducité du contrat de location financière : précision confirmée

La Cour de cassation confirme, à l’occasion d’un projet impliquant un contrat informatique, la règle selon laquelle les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière, sont interdépendants et, partant, que doivent être réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance (1).

Actualités, Articles, Pénal numérique, Publication

Vol de données : modification de l’article 323-3 du Code pénal

La loi n°2014-1353 du 13 novembre 2014, renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme opère, par son article 16, un changement de rédaction de l’article 323-3 du Code pénal, permettant de réprimer le vol de données, sans toutefois recourir à la qualification de vol. Institués par la loi dite « Godfrain », les articles 323-1 à 323-4 du Code pénal (1) prévoyaient cinq atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données (bien connus sous l’appellation « STAD »), lesquelles sont : l’accès ou le maintien frauduleux dans le STAD ; l’action d’entraver ou de fausser le fonctionnement du STAD ; l’introduction frauduleuse de données dans un STAD ou la modification des données qu’il contient ; l’importation, la détention, l’offre, la cession ou la mise à disposition d’un équipement, d’un instrument, d’un programme informatique ou de toute donnée conçus ou spécialement adaptés pour commettre des infractions au STAD ; enfin, la participation à un groupement de pirates informatiques. Cette troisième atteinte a été modifiée en novembre dernier afin d’intégrer dans son champ de répression l’inquiétant et récurrent vol de données, qui y échappait jusqu’alors. L’ancien texte permettait, en effet, uniquement de condamner l’introduction, la suppression ou la modification frauduleuse de données dans un STAD… mais nullement leur copie. Pour combler ce vide juridique, plusieurs voies avaient été envisagées, parmi lesquelles la contrefaçon ou l’abus de confiance. La qualification de vol qui semblait correspondre au mieux à la copie de données avait été, quant à elle, écartée, tant il était considéré (sans doute à juste titre) qu’il n’y avait pas soustraction frauduleuse d’une chose appartenant à autrui (2) : absence de soustraction, d’une part, puisque le légitime propriétaire des données les conserve et n’en est à aucun moment dépossédé (sauf hypothèse du vol de disque dur) ; absence de chose à proprement parler, d’autre part, puisque la soustraction vise un bien matériel pouvant être saisi physiquement (là où les données sont des biens immatériels). Or, la loi pénale est d’interprétation stricte et la règle est d’or. Malgré les tentatives de la jurisprudence (3), la répression du « vol » de données se fait donc au détour de la qualification de vol (et de celle de recel), par l’ajout de quatre mots au texte de l’article 323-3 du Code pénal, en vigueur depuis le 15 novembre 2014, lequel réprime désormais, outre le fait d’introduire, de modifier et de supprimer, le fait « d’extraire, de détenir, de reproduire, de transmettre » frauduleusement des données dans un STAD. La loi du 13 novembre 2014 vient ainsi sanctionner la copie frauduleuse de données, dans une optique de protection accrue de « l’économie de la connaissance ». Virginie Bensoussan-Brulé Annabelle Divoy Lexing Droit pénal numérique (1) L. n°88-19 du 5-1-1988 relative à la fraude informatique, insérant les articles 323-1 à 323-4 dans le Code pénal, en son Livre II « Des crimes et des délits contre les biens », Titre II « Des autres atteintes aux biens ». (2) Comme l’exige l’article 311-1 du Code pénal, définissant l’infraction de vol. (3) Cass. crim. 4-3-2008 n°07-84.002 Jean-Paul X Sté Graphibus.

Evénement, Géolocalisation, Informatique et libertés, Revue de presse

sms, mails, votre employeur peut-il vous espionner ?

Sms, mails : votre employeur peut-il vous espionner ? Alain Bensoussan, avocat spécialisé en droit des technologies et protection des données personnelles répondait aux questions de Pierre de Vilno sur Europe 1 midi le 20 février. Un procès a confronté un salarié à son employeur qui était allé regardé les Sms échangés sur son portable professionnel. La cour de cassation vient de lui donner raison. L’employeur a le droit d’interroger le téléphone professionnel d’un salarié pour regarder les Sms envoyés et reçus sans avoir à demander l’avis du salarié (Cass. com. 10-2-2015, n° 13-14779). Cette jurisprudence est née d’un litige entre deux entreprises ; celle qui s’estimait lésée a utilisée comme preuve des Sms échangés par des salariés avec leurs téléphones professionnels. La Cour de cassation a considéré ses messages comme des preuves tout à fait recevables car on n’est plus dans le domaine de la vie privée dès lors que l’on utilise du matériel mis à disposition de l’entreprise. Pour surveiller les messages des employés plusieurs solutions existent. L’employeur peut bien sur vérifier directement en prenant le téléphone professionnel. Mais dans beaucoup d’entreprises, il existe un serveur par lequel transitent tous les Sms et que l’employeur peut consulter dès lors qu’ils ne sont pas signalés en objet comme « personnel » ou « privé ». Pour Alain Bensoussan, « cette jurisprudence est la suite d’une construction qui a commencé avec l’affaire Nikon et le droit à la vie privée résiduelle des salariés dans l’entreprise. Dans cet arrêt du 2 octobre 2001, la Cour de cassation consacre dans tous les médias, le droit du salarié à avoir une vie privée résiduelle dans l’entreprise. Dans la mesure où cette cette vie privée est clairement identifiée, l’employeur n’a pas le droit d’y avoir accès. En milieu professionnel, tout ne relève pas nécessairement du travail, il peut y avoir des moments privés. Cette vie personnelle peut s’exprimer sans qu’il y ait détournement de l’obligation de loyauté. Dans un deuxième temps, cette jurisprudence considère que dans la mesure où elle est identifiée, l’employeur n’a pas le droit de contrôler cette vie privée résiduelle, quel que soit le média. La règle qui est posée à l’époque, est que tout est professionnel, sauf ce qui est expressément signalé par le salarié comme étant personnel ou privé. On a continuer à construire ce droit à la vie privée résiduelle avec notamment, une charte organisant cette vie privée au sein de l’entreprise (…) »  Le Journal de Wendy Bouchard sur Europe1, Europe Midi (Ecoutez l’émission du 20 février 2015 : à 57:40)

Actualités, Brevet

Création du fonds souverain de la propriété intellectuelle (FSPI)

Le 23 décembre 2014, l’Etat français et la Caisse des dépôts et consignations ont signé la convention destinée à mettre en œuvre la création du fonds souverain de la propriété intellectuelle (FSPI), confirmant ainsi la détermination étatique à protéger les brevets français. La création de ce nouvel outil de valorisation des brevets français intervient 4 ans après la création de France Brevets, fonds d’investissement gestionnaire du FSPI qui a pour mission d’acquérir des droits sur les brevets issus de la recherche française, de les regrouper en grappes technologiques puis d’octroyer des licences à prix de marché aux entreprises françaises, essentiellement des petites et moyennes entreprises. Les grappes technologiques consistent à assembler plusieurs brevets issus d’origines différentes pour proposer aux éventuels utilisateurs une offre à plus forte valeur ajoutée. Complémentaire au dispositif de France Brevets, le fonds souverain vise à élargir l’accès à la propriété intellectuelle, notamment en facilitant l’octroi de licences aux petites entreprises, et diminuer le risque concernant la diffusion commerciale des innovations. L’Etat souhaite en effet « réaliser les acquisitions de brevets qu’il juge nécessaires pour lever les barrières à l’entrée des marchés, et favoriser le développement de l’industrie française par la diffusion des innovations » . Les compétences et missions du FSPI et de France Brevets étant proches, ceux-ci doivent travailler en synergie afin d’améliorer la diffusion des innovations par la valorisation de la propriété intellectuelle issue de la recherche française. Plus concrètement et à l’image de France Brevets, le fonds souverain aura pour mission l’acquisition de brevets d’entreprises françaises et européennes et l’octroi de licences à prix de marché aux entreprises françaises. L’accord conclu avec les entreprises pourra comporter une prestation de diagnostic et de conseil. Le fonds souverain aura également pour objectif d’inclure dans les normes internationales des brevets issus de la recherche française pour que leur valeur et leurs perspectives commerciales soient rehaussées. Afin de remplir ses objectifs, le FSPI a été doté d’un budget de 100 millions d’euros. L’effort budgétaire octroyé par l’Etat, nonobstant les difficultés financières actuelles, s’inscrit dans un contexte international plus général. Les puissances mondiales se mènent en effet une véritable guerre des brevets et créent des fonds d’investissement pour la valorisation de leurs brevets nationaux. La stratégie de l’Etat français s’inscrit donc dans ce mouvement d’acquisitions des inventions afin d’en assurer la défense et de bénéficier des retombées économiques en France. Néanmoins, la création du fonds souverain ne va pas sans rappeler la problématique d’origine américaine des « patent troll », entités créées dans le seul but d’acquérir des brevets pour ensuite octroyer des licences d’exploitations à des tiers ou introduire des actions en justice sur le fondement d’une violation de ces derniers. Bien que le « patent troll » permette de mieux protéger les brevets individuels, leur effet paralysant sur l’innovation s’est déjà fait sentir aux Etats-Unis, notamment en raison de la menace judiciaire permanente qui pèse sur les entreprises innovantes. En outre, il est probable que face à la création d’un fonds d’investissement français, les autres Etats européens créent des entités équivalentes pouvant entraîner une spirale protectionniste au détriment de l’innovation. Virginie Brunot Juliette Dhuyser Lexing Droit Propriété industrielle

Actualités, Fiscalité - Société, TVA

TVA : de nouvelles règles pour les services électroniques

Depuis le 1er janvier 2015, les services de télécommunications, de radiodiffusion, de télévision et les services électroniques sont imposables à la TVA selon les taux en vigueur dans l’Etat où le consommateur est domicilié, et non plus au lieu d’établissement du prestataire (1). En conséquence, ces prestations sont désormais taxées dans le pays du client, indépendamment du fait que le client soit une entreprise ou un particulier et indépendamment du fait que le prestataire soit établi dans ou hors de l’Union Européenne (UE). Par pays du client, il convient d’entendre pour une entreprise (personne assujettie à la TVA), soit le pays où l’entreprise est immatriculée, soit le pays où elle a un établissement stable bénéficiaire du service et pour un particulier (personne non assujettie à la TVA), le pays où le particulier est établi, ou à son domicile ou sa résidence habituelle. La localisation du client est déterminée par celle de la ligne fixe à partir de laquelle l’achat est effectué, du code mobile, de la carte SIM, de l’adresse IP, des coordonnées bancaires. Ainsi, si une entreprise dont le siège social est au Luxembourg vend des services en ligne (vidéos à la demande, fourniture d’accès à internet, téléchargement de musique, livres électroniques, enchères en ligne, abonnement à un site de presse en ligne) à un client domicilié en France, c’est le taux de TVA applicable en France qui s’appliquera. Les services électroniques visés par ces nouvelles dispositions sont les services fournis par internet ou sur un réseau électronique et dont la nature rend la prestation largement automatisée, accompagnée d’une intervention humaine minimale et impossible à assurer en l’absence de technologie de l’information. Ces services électroniques concernent notamment l’abonnement à des journaux et des périodiques en ligne, l’accès au téléchargement de logiciel, l’utilisation de moteur de recherche ou les jeux en ligne. Pour l’acheteur, ces nouvelles dispositions l’obligera à déclarer son lieu de résidence et pour le vendeur à devoir gérer des taux de TVA distincts selon le pays du client. Alors qu’en principe, le prestataire doit déclarer et payer la TVA dans chaque Etat de consommation, le guichet électronique unique mis en place permettra aux entreprises qui fournissent des services en ligne à des clients situés dans plusieurs pays de l’Union Européenne, de déclarer et d’acquitter la TVA dans leur propre Etat de façon centralisée à charge pour l’administration de cet Etat de transmettre chaque trimestre les éléments déclarés et de reverser la TVA aux Etats de consommation. En revanche, les ventes à distance de biens physiques ou matériels non délivrés par voie électronique ne sont pas concernées par ces nouvelles dispositions. Pierre-Yves Fagot Lexing Droit Entreprise (1) Commission européenne, Note explicative du 3-4-2014

Actualités, Mode et luxe

Formation Design, droit et technologie

La lutte contre la contrefaçon sur internet et les règles juridiques applicables au commerce en ligne sont les deux thèmes proposés dans le cadre de la formation organisée par LE LIEU DU DESIGN à destination des designers et agence de design qui sera animée par Naima Alahyane Rogeon, le 3 avril prochain.

Actualités, Articles, Pénal numérique, Publication

Les atteintes au STAD par l’exploitation de failles de sécurité

L’exploitation de failles de sécurité fait partie des atteintes au STAD par l’introduction frauduleuse de données dans le système. Un internaute qui souhaitait plaisanter l’a appris à ses dépends. Humour ou infraction ? Telle est, en substance, la question que le Tribunal correctionnel de Paris a eu à trancher dans sa décision du 18 décembre 2014. Tout est parti d’une mauvaise blague. Ayant constaté que le site internet officiel de la députée-maire Rachida Dati comportait une faille informatique, un internaute quelque peu connaisseur s’est aperçu, non sans amusement, que celle-ci lui permettait d’injecter directement du contenu dans les différentes pages du site. Il pouvait ainsi modifier directement les dires de la députée-maire et lui prêter de faux communiqués de presse, fort parodiques. Si l’internaute prenait plaisir à la plaisanterie, il en était toutefois le seul public, la manipulation n’emportant nullement modification ou suppression de données du site officiel de Rachida Dati. Son résultat consistait uniquement en la création d’un lien internet pouvant être diffusé : quiconque accédait donc au lien pouvait voir apparaître le contenu ainsi modifié. Notre internaute l’avait compris, plus on est de fous, plus on rit. Décidant qu’il était temps de donner à sa blague une audience élargie, il fait alors appel à un second internaute qui lui fournit un nom de domaine (www.tweetpop.fr/le-cadeau-de-rachida), hébergeant un site internet dédié à la farce. Le site offre la possibilité à tout internaute, fût-il même novice en informatique, d’exploiter la faille de sécurité constatée et d’afficher sur son navigateur un communiqué de presse formellement semblable en tous points à ceux publiés sur le site officiel de la députée maire (identité de la mise en page générale, présence d’une photographie de Rachida Dati, similitude des couleurs utilisées, respect de la charte graphique, etc.), à l’exception, bien sûr, du contenu du communiqué, librement modifiable par quiconque a actionné le lien. Avec la rediffusion de ce même lien sur le compte Twitter de notre premier internaute (qui ne possédait pas moins de 4 000 contacts), les faux communiqués de presse, prêtant à Rachida Dati des propos injurieux ou diffamatoires tant sur elle-même que sur d’autres, font alors légion. De nombreux internautes s’en donnent à cœur joie et la rare finesse de l’humour déployé peut, d’ailleurs être saluée, comme en atteste, par exemple, le remplacement de la mention officielle « Groupe PPE » (Parti Populaire Européen) par la mention « Groupe PIPE ». Seulement, la blague n’est pas du goût de tout le monde. Apprenant la nouvelle, la députée-maire, quant à elle, rit jaune et dépose immédiatement plainte contre X auprès des services de police pour atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données (STAD) et usurpation d’identité sur support numérique. Nos deux internautes ne tardent pas alors à être identifiés et la blague tourne court. Le premier internaute (qui avait constaté la faille et l’avait rendue publique) écope, en effet, d’une amende de 3000 euros pour les chefs d’usurpation de l’identité d’un tiers et d’introduction frauduleuse de données dans un système de traitement automatisé (STAD). Le second (qui avait fourni le nom de domaine permettant de rendre publique l’existence de la faille informatique) est, quant à lui, condamné au paiement d’une amende de 500 euros du chef de complicité d’usurpation de l’identité d’un tiers. La relative sévérité de ces peines semble être nettement fonction de la piètre qualité de leur humour, comme le révèlent les sermons, presque paternalistes, adressés lors de l’audience par le président de la 13e chambre correctionnelle. Tant et si bien, d’ailleurs, que certains se demandent si ce niveau de qualité n’a pas été jusqu’à guider la caractérisation de l’une des infractions. Le jugement du 18 décembre 2014 présente, en effet, un intérêt particulier au regard du droit pénal. L’application de la loi Godfrain (loi n°88-19 du 5 janvier 1988), qui avait inséré dans le Code pénal un article 323-3 venant réprimer l’introduction frauduleuse de données dans un système de traitement automatisé (STAD), ne coulait pas de source, en l’espèce. Un doute existait, à dire vrai, sur l’application de cette infraction à notre premier internaute, dans la mesure où la faille informatique ainsi reprochée n’intervenait, comme dit plus haut, que pour lui seul, sans que le site officiel de la députée-maire n’en soit nullement altéré. Notre internaute introduisait-il alors véritablement des données dans le STAD en cause, dans la mesure où ces données n’avaient ni pour vocation ni pour effet d’y demeurer ? A tout le moins, la question méritait d’être posée. Or, l’argumentation du parquet la laisse en suspens, affirmant en guise de réponse que le prévenu « avait manifestement cherché à tromper le serveur et faire du champ rechercher  un usage contraire à sa vocation initiale et non-souhaité par le « maître du système », ce dont il avait connaissance ». Autrement dit, à démultiplier les failles, il avait fait en sorte que le site officiel paraisse incohérent et, dès lors, s’était rendu coupable d’une introduction frauduleuse de données. Ce raisonnement, qui ne justifie nullement en quoi l’introduction de données était réellement caractérisée, a donc attisé quelques critiques, notamment celles du quotidien Le Monde, qui y voit un élargissement de l’infraction d’introduction frauduleuse dans un STAD jusqu’à en faire un « délit technique subjectif », en ce qu’il tient compte des intentions de l’auteur du site. Le second enjeu majeur de la décision a, bien évidemment, trait à la liberté d’expression, thème brûlant de notre actualité politique. A son sujet, le tribunal affirme que « Si la liberté d’expression est une notion fondamentale de toute démocratie, celle-ci doit naturellement trouver ses limites et il est de jurisprudence constante que cette liberté ne doit en aucune mesure viser à porter atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne, même si celle-ci est publique ». Derrière la reprise de cette formule classique, se devine pourtant aisément la difficulté de mise en œuvre de cette liberté et de ses limites. La solution eut-elle été la même si l’humour avait été plus fin ? Le doute demeure. Eu égard tant à l’application

Actualités, Internet contentieux, Web 2.0

Mandataire professionnel non révélé et vices cachés

Le professionnel, qui agit comme mandataire pour le compte d’un vendeur particulier, en dissimulant cette qualité, peut voir sa responsabilité engagée du fait des vices cachés affectant la chose vendue. C’est ce que la Cour de cassation vient d’affirmer dans un arrêt du 18 décembre 2014. En l’espèce, un particulier avait acheté, sur une plateforme internet de mise en relation, un véhicule d’occasion auprès d’un internaute identifié sous le pseudo « pierrot92220 ». L’acheteur a ensuite réglé les sommes dues et pris possession du véhicule auprès de son interlocuteur « pierrot92220 », qui s’est trouvé être un garagiste, contre remise par ce dernier des certificats d’immatriculation et de cession. Très vite, à savoir dès le lendemain de la prise de possession du véhicule, des dysfonctionnements importants sont apparus et l’expert désigné par la compagnie d’assurance de l’acheteur, après avoir examiné le véhicule, a conclu que celui-ci se trouvait hors d’usage, du fait d’un défaut d’entretien préexistant à la vente, caractérisant ainsi l’existence de vices cachés affectant la chose vendue. L’acheteur a alors intenté, à l’encontre du garagiste auprès duquel il avait pris possession du véhicule, une action en résolution de la vente et en paiement de dommages intérêts sur le fondement de la garantie des vices cachés. Pour se défendre, le garagiste faisait valoir ne pas être le propriétaire du véhicule (qui appartenait à l’un de ses clients) et n’être pas intervenu dans la vente autrement qu’en « prêtant » son terminal de paiement par carte bancaire, ce dont il en concluait :  (i) qu’il ne pouvait pas être considéré comme le vendeur de ce véhicule mais uniquement comme mandataire et (ii) que cette action sur le fondement des vices cachés à son encontre était irrecevable, la garantie des vices cachés étant à la charge exclusive du vendeur de la chose viciée, dont le nom figurait sur le certificat d’immatriculation et sur le contrat de cession. La Cour d’appel, infirmant la décision des juges de premières instances, a toutefois accueilli la demande de l’acheteur fondée sur la garantie des vices cachés et prononcé la résolution de la vente assortie d’une condamnation au paiement de la somme de 1500 € à titre de dommages intérêts (à charge, en outre, pour le garagiste de récupérer le véhicule auprès de l’acheteur et de restituer les sommes versées en vue de son acquisition). La décision de la Cour de cassation, saisie d’un pourvoi par le garagiste, écarte les moyens soulevés précisant que, compte tenu des circonstances de l’achat et de la prise de possession du véhicule et du fait que le garagiste n’avait donné aucune indication sur sa qualité de mandataire, la Cour d’appel en a justement déduit que, peu important la mention sur les certificats d’immatriculation et de cession, insuffisante à établir la propriété du bien vendu, le garagiste, professionnel de l’automobile, avait engagé sa responsabilité du fait des vices cachés affectant le véhicule, en dissimulant à l’acquéreur sa qualité de mandataire et en se comportant comme le vendeur du véhicule. Le pourvoi rejeté, la Cour de cassation ne renvoie pas l’affaire mais en profite pour condamner le garagiste aux dépens et au paiement de la somme de 3000 € au titre des autres frais exposés pour la procédure. Lexing Droit Marketing électronique

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