août 2015

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Portée contractuelle d’un échange de courriers électroniques

Les courriers électroniques peuvent valoir commande ferme de la part d’un client lorsque leurs termes sont suffisamment clairs et précis, selon la Cour de cassation. Portée des courriers électroniques. Une société, après avoir adressé à un expert-comptable un courrier électronique contenant trois interrogations relatives à la fiscalité applicable à un expatrié, refuse d’honorer la facture afférente à la consultation transmise en réponse. Si le Tribunal de commerce de Nanterre rejette l’argumentation de l’expert-comptable, estimant que l’email en question ne peut valoir que comme prise de contact et demande de conditions financières d’intervention éventuelle, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement. En effet, cette dernière considère, dans un arrêt remarqué du 1er juillet 2015, que le courrier électronique litigieux, dans la mesure où il contient des termes suffisamment clairs et précis, vaut commande ferme de consultation. Ni l’origine, ni le contenu dudit courrier électronique ne sont en l’espèce contestés. De la question de savoir si cet échange emporte véritable commande de la part du client, dépendait donc la validité de la créance revendiquée par l’expert-comptable. La Cour de cassation répond par l’affirmative en considérant que le juge de 1ère instance a dénaturé les preuves que lui avaient soumises les parties, en particulier en ce qui concerne l’appréciation de la portée des termes du courrier électronique en question. Gestion contractuelle des échanges de courriers électroniques. La portée des échanges de courriers électroniques entre client et fournisseur est une problématique récurrente, en particulier dans les domaines où le principe contractuel du consensualisme s’applique. Au visa de l’article 1134 du Code civil, la Cour de cassation estime, par une application classique des mécanismes d’offre et d’acceptation, qu’un simple échange de courrier est susceptible de créer un lien contractuel entre un client et un fournisseur. Il pourrait de même, par une interprétation extensive de cet arrêt, être considéré qu’un tel échange puisse avoir valeur d’avenant à un contrat existant. C’est pourquoi, en vue d’éviter tout litige ultérieur, les parties ont fort intérêt à insérer, au sein de leurs documents contractuels (Conditions générales, contrat négocié, etc.), des dispositions qui déterminent clairement : les modalités de passation des commandes par le client ; les exigences de forme que les éventuels avenants devront respecter. Jean-François Forgeron Nicolas Dubospertus Lexing Droit informatique  

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Précisions sur la notion d’autorité de la chose jugée

Par arrêt du 16 avril 2015, la Cour de cassation précise les conditions de l’autorité de la chose jugée (c’est-à-dire les effets attachés à une décision de justice) telles qu’énoncées par le Code civil. Le principe de la décision. Ayant exercé diverses fonctions en entreprise puis dans une administration depuis, M. X a sollicité, pour la seconde fois auprès du conseil de l’ordre, son admission au barreau de Saint-Denis, invoquant, pour ce faire, le bénéfice des dispenses de formation prévues pour les juristes d’entreprise. Le conseil de l’ordre ayant, à nouveau, rejeté sa demande par délibération du 19 octobre 2012, M. X a formé un recours à l’encontre de celle-ci. Confirmant la décision du conseil de l’ordre, la Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion a considéré qu’ayant déjà été jugé, par décision revêtue de l’autorité de la chose jugée, que la condition d’une expérience professionnelle juridique d’au moins huit années n’était pas remplie, seules les expériences professionnelles non invoquées dans l’instance antérieure ou postérieure à celle-ci pouvaient être prises en compte. Considérant que l’autorité de la chose jugée, attachée au seul dispositif de la décision, ne pouvait être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice, la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel au visa de l’article 1351 du Code civil. Les conséquences. En vertu de l’article 1351 du Code civil, l’autorité de la chose jugée s’oppose à l’introduction d’une nouvelle demande fondée sur la même cause entre les mêmes parties. Au motif que la demande nouvelle formée par M. X reposait sur la survenance d’un élément postérieur à la décision du Conseil de l’ordre modifiant de ce fait sa situation, la Cour de cassation a considéré que les faits à l’origine de la nouvelle demande (cause de la nouvelle demande) étant différents de ceux de la demande initiale, l’autorité de la chose jugée ne pouvait lui être opposée. Ce faisant, elle se positionne en faveur d’une conception étroite de l’autorité de la chose jugée (à la différence d’autres décisions retenant une conception large) visant certes à créer une certaine instabilité des situations juridiques, mais traduisant sa volonté d’assurer une bonne administration de la justice et le respect du principe du contradictoire. A toutes fins utiles, cet arrêt ne vise que les décisions revêtues de l’autorité de la chose jugée, à l’exclusion des décisions de référé, des ordonnances sur requête, des décisions du juge ou du conseiller de la mise en état, des jugements avant dire droit ainsi que des décisions ordonnant le rabat de l’ordonnance de clôture, la réouverture des débats et le sursis à statuer. Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot Alexandra Massaux Lexing Contentieux informatique

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Autorité de la chose jugée et revirement de jurisprudence

Par décision du 17 mars 2015, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) s’est prononcée sur la recevabilité d’une demande déjà présentée et jugée mais qui depuis lors avait fait l’objet d’un revirement de jurisprudence. Le principe de la décision. Le requérant de l’espèce s’était pourvu en justice afin de mettre un terme au prêt à usage dont bénéficiaient les occupants de l’immeuble dont il était nu propriétaire et usufruitier. En 2002, il avait été débouté de sa demande fondée sur le défaut d’entretien de l’immeuble. Estimant que cet arrêt était conforme à la jurisprudence en vigueur, le requérant ne s’était pas pourvu en cassation. En 2004, la Cour de cassation avait fait évoluer sa jurisprudence en énonçant qu’un prêt à usage indéterminé pouvait être unilatéralement résilié à tout moment. Le requérant avait alors assigné à nouveau les époux V. en demandant la résiliation du prêt toujours pour défaut d’entretien (et non en application du nouveau principe autorisant un prêteur à mettre fin unilatéralement à un prêt à usage à durée indéterminée). La Cour de cassation avait rejeté le pourvoi en raison de l’autorité de la chose jugée de l’article 1351 du Code civile selon laquelle la chose jugée par un jugement antérieur fait autorité à l’égard d’une nouvelle demande fondée sur la même cause et en présence d’une identité des parties et de l’objet. Devant la CEDH, le requérant invoquait la violation de l’article 6, paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’homme au motif qu’il s’était vu privé du bénéfice du revirement de jurisprudence opéré par la Cour de cassation. La CEDH a estimé que le requérant n’a pas été privé de sa possibilité de bénéficier du revirement de jurisprudence dans la mesure où sa seconde demande n’était pas fondée sur ce nouveau fondement juridique mais sur sa demande initiale. La motivation de la décision. Depuis 7 juillet 2006 la Cour de cassation a consacré le principe de la concentration de moyens. En application de ce principe le demandeur est tenu de présenter dès la première instance l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder sa demande. En application de ce principe, la Cour de cassation a légitimement pu juger que le demandeur qui ne fonde pas dès la première instance sa requête sur le revirement de jurisprudence dont il souhaite bénéficier, mais uniquement sur une motivation qui a d’ores et déjà été jugée par une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée, ne peut voir sa demande prospérer. La CEDH a considéré que le principe de la concentration des moyens poursuit un but légitime, en conséquence de quoi le demandeur de l’espèce n’avait pas été privé du droit de bénéficier du revirement de jurisprudence dans la mesure où il n’avait pas fondé sa deuxième demande sur le droit issu de ce revirement. Le demandeur à une instance qui concerne les mêmes parties, le même objet et qui a déjà fait l’objet d’une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée ne peut bénéficier d’un revirement de jurisprudence ultérieur que s’il fonde sa nouvelle demande sur ledit revirement. Sinon sa demande sera déclarée irrecevable en application du principe de l’autorité de la chose jugée. Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot Lexing Contentieux informatique

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Les outils juridiques et techniques protecteurs de l’innovation

Marie Soulez animera une session de formation, qui se déroulera à Paris le 25 novembre 2015. Initiée par Francis Lefebvre Formation, elle vise à permettre aux entreprises de mieux appréhender les outils juridiques et techniques et ainsi d’optimiser la protection de leurs innovations. A l’instar des idées innovantes, les concepts sont insusceptibles d’être protégés par le droit de la propriété intellectuelle, dès lors qu’ils ont été insuffisamment formalisés. Forts de ce constat, les organisateurs de cette formation se sont attachés à : présenter les spécificités juridiques relatives à la protection d’un projet innovant ; identifier le référentiel applicable ; optimiser la protection et identifier le schéma contractuel de protection. Marie Soulez exposera ainsi les enjeux juridiques de la protection de l’innovation pour ensuite évoquer les outils juridiques et techniques correspondants : le référentiel légal de protection ; le « secret d’affaires » et les informations commerciales confidentielles ; l’audit de propriété intellectuelle ; les moyens techniques et juridiques de protection du projet innovant ; le schéma contractuel de protection. Cette formation est destinée aux responsables juridiques, responsables de projets innovants, responsables recherche et développement, directeurs financiers et avocats, auxquels sera également proposé un calendrier des actions à mettre en oeuvre dès l’identification de l’innovation à protéger. Programme détaillé de la conférence. Inscription à cette adresse 

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Audiovisuel : les décisions CSA LCI et Paris Première annulées

Le Conseil d’Etat a, par deux arrêts du 17 juin 2015, annulé les décisions « LCI » et « Paris Première » du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), par lesquelles l’autorité de régulation avait refusé le passage de ces chaînes en TNT gratuite (1). Par dérogation à la procédure d’autorisation (dite « procédure ouverte ») visée à l’article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA peut, depuis la loi n°2013-1028 du 15 novembre 2013, autoriser le passage de la TNT payante vers la TNT gratuite, en application de l’article 42-3 de cette même loi qui dispose en ses alinéas 1er et 4 : « L’autorisation peut être retirée, sans mise en demeure préalable, en cas de modification substantielle des données au vu desquelles l’autorisation avait été délivrée, notamment des changements intervenus dans la composition du capital social ou des organes de direction et dans les modalités de financement. Sous réserve du respect des articles 1er et 3-1, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut, par décision motivée, donner son agrément à une modification des modalités de financement lorsqu’elle porte sur le recours ou non à une rémunération de la part des usagers. Préalablement à sa décision, il procède à une étude d’impact, notamment économique, rendue publique dans le respect du secret des affaires. Il procède aussi à l’audition publique du titulaire et entend les tiers qui le demandent. Cette modification de l’autorisation peut être agréée si les équilibres du marché publicitaire des services de télévision hertzienne terrestre sont pris en compte ». Saisi sur le fondement de l’article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 par la société La Chaîne Info (LCI) et les sociétés Métropole Télévision (M6) et Paris Première, le CSA avait refusé, par décisions du 29 juillet 2014, leurs demandes de passage en TNT gratuite estimant que : compte tenu de la conjoncture du marché publicitaire et de la baisse des recettes publicitaires des services de télévision, l’arrivée d’une ou plusieurs chaînes gratuites supplémentaires ne pourrait pas être portée par une croissance du marché publicitaire ; la situation financière de plusieurs chaînes gratuites était encore fragile ; l’arrivée d’une ou plusieurs chaînes gratuites supplémentaires, dans un paysage déjà composé de 25 chaînes constituant une large gamme, serait de nature à entraîner des phénomènes de transfert d’audience au détriment des chaînes gratuites existantes. Le CSA en avait conclu que l’arrivée de ces nouvelles chaînes dans le paysage de la TNT gratuite viendrait créer des difficultés et des déséquilibres, portant atteinte à la préservation de la diversité éditoriale des chaînes diffusant sur la TNT gratuite. Saisi par les sociétés La Chaîne Info, Métropole Télévision (M6) et Paris Première de deux recours en excès de pouvoir, le Conseil d’Etat a pu se prononcer tant sur la conventionalité de la procédure dérogatoire de l’article 42-3 que sur la légalité des décisions rendues par le CSA, sans toutefois se prononcer sur l’analyse économique ayant justifié les refus d’agrément. Le Conseil d’Etat a considéré que l’article 42-3 était bien conforme à la directive « autorisation » du 7 mars 2002 et à la directive « concurrence » du 16 septembre 2002, précisant toutefois qu’il appartenait au CSA d’apprécier si, « en raison notamment de l’absence de fréquence disponible, l’impératif de pluralisme et l’intérêt du public », il était justifié de ne pas recourir à une procédure ouverte. Quant à la légalité des décisions, le Conseil d’Etat a considéré qu’à défaut pour le CSA d’avoir rendue publique l’étude d’impact avant la date à laquelle il a été statué sur les demandes, ce qui aurait ainsi permis aux demandeurs et autres personnes intéressés de faire valoir leurs observations écrites ou d’être entendus sur les conclusions de l’étude, les décisions rendues le 29 juillet 2014 sont entachées d’irrégularité. En effet, en l’espèce, l’étude d’impact avait été rendue publique le jour de la décision du CSA. L’autorité de régulation devra, en conséquence, se prononcer une nouvelle fois sur les demandes des chaînes, et ce dans un délai de six mois, en se conformant aux exigences posées par le Conseil d’Etat. Lexing Alain Bensoussan Avocats Lexing Vie privée et Presse numérique (1) CE 17-6-2015, n°385474, Sociétés Métropole Télévision (M6) et Paris Première CE 17-6-2015, n°384826, Société La Chaîne Info (LCI) CSA 29-7-2014, n°2014-358, Sociétés Métropole Télévision (M6) et Paris Première CSA 29-7-2014, n°2014-357, société La Chaîne Info (LCI)

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