Presse et communication numérique

RGPD dans les collectivités
Presse et communication numérique

Vers un élargissement communautaire de l’ immunité parlementaire ?

Dans sa décision du 12 avril 2012, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) condamne la France pour ingérence dans l’exercice du droit de liberté d’expression d’un élu. Celui-ci avait été condamné pénalement pour diffamation publique envers un opposant politique. En l’occurrence, il s’agissait d’un élu municipal qui, au cours d’une séance du conseil municipal, avait invectivé l’adjoint au maire chargé des finances de la ville sur les conditions de sa gestion. La Cour rappelle « que la critique à l’égard d’un homme politique est plus large que celle d’un simple particulier ». Surtout, elle énonce que « si les déclarations du requérant n’étaient pas couverte par une quelconque immunité parlementaire, elle ont été prononcées dans une instance pour le moins comparable au parlement pour ce qui est de l’intérêt que présente, pour la société, la protection de la liberté d’expression », et en déduit qu’une ingérence dans la liberté d’expression exercée dans le cadre de ces organes ne peut se justifier que pour des motifs impérieux qui n’étaient pas réunis en l’espèce. En se prononçant de la sorte, la Cour livre sa vision générale de ce que doit impliquer le régime des immunités prévue par l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse, notamment de l’ immunité parlementaire qui figure au premier alinéa, si ce régime veut respecter le principe énoncé par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme Elle semble considérer que le régime dérogatoire qui s’applique aux paroles prononcées au sein des deux chambres du parlement national s’étend, de fait, aux paroles proférées par un élu lors d’un conseil municipal. Cette décision n’est pas exempte d’interrogations. Tout d’abord, quelle est le champ d’application de la solution énoncée ? S’applique-t-elle uniquement aux conseils municipaux ? A tous les organes décisionnaires des collectivités territoriales ? Ou, plus largement, aux paroles prononcées au sein de tous les conseils d’entités bénéficiant d’un statut public ? Par ailleurs, se pose la question de savoir comment concilier cette interprétation extensive de la liberté d’expression, telle que définie à l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec la formulation stricte de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881, qui réserve le régime des immunités aux discours prononcés aux sein de l’Assemblée nationale et du Sénat. A n’en pas douter, cette solution risque de générer des contradictions entre les décisions judiciaires nationales et celles rendues sur le fondement de la Convention européenne des droits de l’homme. CEDH 12-4-2012 n° 54216/09

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Internet et vie privée : quel est le délais de prescription ?

Un périodique national avait, au mois d’août 1996, publié sur son site internet un article concernant l’état de santé d’une personne. Cette personne, estimant que ces informations constituaient une atteinte à sa vie privée, a assigné le journal sur le fondement de l’article 9 du Code civil et de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, le 7 septembre 2009, soit 13 ans après la publication du contenu incriminé. Internet et vie privée : délits de presse Le demandeur soutenait que le point de départ du délai de prescription de 10 ans était soit le « jour de la manifestation du dommage causé à la victime ou (…) la date à laquelle il a été révélé à cette dernière », mais la Cour de cassation a rappelé que « le délai de prescription de l’action en responsabilité civile extracontractuelle engagée à raison de la diffusion sur le réseau Internet d’un message, court à compter de sa première mise en ligne, date de la manifestation du dommage allégué ». Ce principe, affirmé par la Cour de cassation dans un arrêt du 30 janvier 2001 en matière de délits de presse commis sur internet, établit une stricte égalité pour le point de départ du délai de prescription entre les messages contenant des propos pouvant entrer dans le champ d’application de loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse et ceux pouvant engager la responsabilité extracontractuelle de leur auteur (atteinte à la vie privée, dénigrement). Il est rappelé qu’une proposition de loi visant à allonger le délai de prescription de l’action publique pour les diffamations, injures ou provocations commises par l’intermédiaire d’internet a été soumise à l’examen du Sénat le 25 juin 2008. Si le principe d’un délai de prescription de trois mois pour les infractions commises par voie de presse, plus court que le délai de droit commun de trois ans retenu pour les délits, étaient remis en cause, le point de départ de cette prescription restait inchangé. Le Conseil Constitutionnel avait, dans une décision du 10 juin 2004, censuré une disposition du projet de loi pour la confiance dans l’économie numérique, qui proposait de fixer le point de départ du délai de prescription pour les délits commis sur internet à la date où cessait la mise en ligne de la publication, estimant qu’une telle différence entre les délits de presse écrite et les délits commis en ligne était excessive. La proposition, adoptée par le Sénat, sur l’allongement du délai de prescription pour les diffamations et injures commises par l’intermédiaire d’internet, a été transmise à l’Assemblée Nationale le 4 novembre 2008 et y est toujours examinée. Cass. Civ. 2 12-4-2012 n° 11-20664

Presse et communication numérique

Conflit entre liberté d’expression et respect de la vie privée

Par deux arrêts rendus le 7 février 2012, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) s’est prononcée sur l’articulation entre liberté d’expression et respect de la vie privée avec un léger avantage pour la première. Dans une première affaire, un journal allemand avait publié des photographies et un article relatant l’arrestation par la police puis la condamnation d’un acteur de télévision pour possession illégale de stupéfiants. Les juges, saisis sur le fondement de l’article 10 de la CEDH, ont considéré que la condamnation du journal était justifiée, alors que la photographie avait été prise dans un lieu très touristique et que les informations étaient confirmées par des sources sûres. Dans la seconde affaire un journal allemand avait publié une photographie accompagnée de commentaires sur le mauvais état de santé de la célébrité concernée. La Cour a estimé que la photographie avaient contribué à un débat d’intérêt général et que les commentaires n’étaient pas déraisonnables. A l’aune de ces deux arrêts, la primeur semble être conférée à la liberté d’expression sur le droit au respect de la vie privée. Et le fait que l’on soit en présence de presse « people » ne paraît pas modifier la donne. En revanche, la Cour semble plus frileuse à faire prévaloir l’article 10 de la CEDH sur l’article 8 lorsque les faits publiés sont liés à une procédure pénale. Sans constituer un revirement, ces deux décisions permettent de palper un peu la position actuelle des juges européens sur un sujet aussi fluctuant. CEDH 7-2-2012 n° 39954/08 CEDH 7-2-2012 n° 40660/08 et 60641/08

Internet contentieux, Presse et communication numérique, Référencement

Google Inc. condamné pour injure du fait de son système Google Suggest

Google Suggest est, comme son nom l’indique, un système de suggestion qui propose aux internautes des recherches en fonction des premières lettres ou des premiers mots tapés. Ce service a fait l’objet de plusieurs litiges pour avoir associé des d’insultes, termes péjoratifs ou propos racistes à certaines sociétés et s’est notamment vu condamné par le Tribunal de grande instance de Paris, le 18 mai 2011, pour avoir fait apparaître le terme « escroc » à côté du nom de la société d’assurance immobilière Lyonnaise de Garantie. Dans un arrêt du 14 décembre 2011, la Cour d’appel de Paris a confirmé la décision de première instance et a condamné Google pour injure publique générée par son système de suggestion. Google Suggest : le rappel des faits Pour rappel, cette société avait découvert que lorsqu’un internaute tapait le nom de la société dans le moteur de recherche, la fonction « suggestion de recherche » lui proposait automatiquement d’ajouter le mot « escroc ». Elle a ainsi porté plainte considérant qu’il s’agissait d’une injure publique lui portant préjudice. Google a tenté de contourner sa responsabilité en invoquant le caractère non intentionnel de ces associations et en indiquant, par ailleurs, qu’elles répondaient à une logique d’automatisation et que celles-ci reflétaient simplement les recherches les plus couramment tapées par les internautes. Or, la Cour d’appel a estimé que le fait de diffuser l’expression « Lyonnaise de Garantie escroc » dans le moteur de recherche correspondait à l’énonciation d’une pensée, « pensée rendue possible uniquement par la mise en œuvre de la fonctionnalité en cause ». Elle énonce, par ailleurs, « il doit en être inféré et compris qu’un tri préalable pouvait être effectué entre les requêtes enregistrées dans la base de données ». Google Suggest : des fonctionnalités de saisie semi-automatique En effet, si les suggestions sont bien proposées automatiquement en fonction des fréquences de recherches, Google disposait de la possibilité d’intervenir manuellement dans cette fonctionnalité, comme il en est déjà le cas, pour éviter l’apparition de suggestions pornographiques. Au regard de ce motif technique, la Cour a condamné Google à la suppression des suggestions sous astreinte de 5000 € par infraction constatée, et à verser à la société d’assurance immobilière Lyonnaise de Garantie 50 000 € à titre de dommages et intérêts et 12 000 € à titre d’indemnité pour injure publique. Enfin, Google doit publier la condamnation sur la page d’accueil de son site, sous peine de devoir payer 5 000 euros par jour de retard, sanction qui n’avait jusqu’alors pas été prononcée en ce domaine. CA Paris 14-12-2011 Eric S., Google c./ Lyonnaise de garantie

Articles, Presse et communication numérique, Publication

Les blogs sont soumis au droit de la presse

La Cour de cassation considère les blogueurs comme des journalistes professionnels et reconnaît que les lois protégeant la presse s’appliquent aussi aux blogs. Les blogs relèvent donc simultanément du droit de la presse et de la loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 s’agissant d’un moyen de communication au public en ligne. Alain Bensoussan pour Micro Hebdo, le 22 décembre 2011

Presse et communication numérique

Atteinte à la vie privée sur internet : compétence des juridictions françaises

Quelle est la compétence des juridictions françaises en cas d’atteinte à la vie privée sur internet ? Un acteur français avait assigné, devant le Tribunal de grande instance de Paris, l’éditeur d’un site internet britannique, estimant qu’un article publié sur son site portait atteinte à sa vie privée et à son droit à l’image. L’éditeur du site ayant soulevé l’incompétence du Tribunal de grande instance de Paris « en l’absence d’un lien de rattachement suffisant entre la mise en ligne litigieuse et le dommage allégué », la juridiction française a décidé de surseoir à statuer et de demander à la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJUE) de statuer sur cette question, sous la forme d’une question préjudicielle (affaire n°C161/10). Dans une seconde affaire (n°C509/09), jointe à la première sur ordonnance du président de la CJUE, un ressortissant allemand, condamné à la prison à perpétuité en 1993 et libéré en 2008, avait agi, devant la juridiction allemande, contre une société autrichienne gérant un portail d’informations sur internet et qui diffusait des contenus relatifs à la procédure pénale dont il avait fait l’objet. Le tribunal allemand avait, dans les mêmes conditions que le Tribunal de grande instance de Paris, sursis à statuer et présenté une question préjudicielle à la CJUE. En réponse, la CJUE a ouvert aux victimes d’atteintes aux droits de la personnalité suite à la publication de contenus sur internet l’option de compétence suivante : au titre de l’intégralité du dommage causé, saisir d’une action en responsabilité : « soit les juridictions de l’Etat membre du lieu d’établissement de l’émetteur de ces contenus ; soit les juridictions de l’État membre dans lequel se trouve le centre de ses intérêts » ; ; au titre du seul dommage causé sur le territoire d’un Etat membre, « introduire une action en responsabilité devant les juridictions de chaque Etat membre sur le territoire duquel un contenu mis en ligne est accessible ou l’a été ». Dans les espèces qui lui étaient soumises, la CJUE a déclaré le tribunal du demandeur compétent pour des propos diffusés par un site internet étranger, dès lors que le demandeur justifiait avoir le centre de ses intérêts dans l’Etat du tribunal saisi. CJUE 25-10-2011 n° C-509/09 et C-161/10 CJUE Communiqué du 25-10-2011

Articles, Médias, Presse et communication numérique, Publication

Propos diffamatoires sur les blogs : prudence et modération…

La tenue de propos diffamatoires sur les blogs peut coûter cher s’agissant d’un délit pénal relevant de la diffamation publique. Propos diffamatoires sur les blogs et diffamation publique Ainsi, le tribunal de Montpellier a jugé, le 7 juillet 2011, que le client mécontent de la construction de sa maison a le droit, au nom de la liberté d’expression, de diffuser des propos relatant ses mésaventures avec l’entreprise de construction. Il doit toutefois faire preuve « de prudence et de modération dans son discours ». Le tribunal l’a condamné à faire cesser toute imputation, sous astreinte de 300 euros par jour de retard. Il a étalement dû verser à la société la somme de 2500 euros à titre de dommages et intérêts pour l’atteinte causée à son image, et à son dirigeant, la somme de 1000 euros en réparation du préjudice moral (TGI Montpellier, 7-7-2011). Alain Bensoussan, « Insatisfaction des clients sur les blogs : prudence et modération », pour Micro Hebdo, le 20 octobre 2011.

anticorruption
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Injure non publique et incapacité à agir des associations

Dans un arrêt du 15 septembre 2011, la Cour d’appel de Paris infirme le jugement du Tribunal de grande instance de Paris en énonçant que l’action du MRAP n’est pas recevable. Le délit d’injure publique En septembre 2009, le MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples) avait fait citer Monsieur Brice Hortefeux devant la 17ème chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Paris ; pour le délit d’injure publique envers un groupe de personnes à raison de leur origine, délit prévu et réprimé par l’article 33 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881. Cette citation faisait suite aux propos, largement diffusés par la suite, tenus par Monsieur Brice Hortefeux, alors ministre de l’Intérieur, lors de l’université d’été de l’UMP de Seignosse. Le Tribunal de grande instance de Paris, par un jugement du 4 juin 2010, avait reçu le MRAP en sa constitution de partie civile. Il a par ailleurs, reconnu Monsieur Brice Hortefeux coupable d’injure non publique envers un groupe de personnes à raison de leur origine. Injure non publique ou injure publique ? Le Tribunal de grande instance avait refusé de conférer un caractère public à l’injure, l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881 disposant que la publicité n’était établie que s’ils étaient « proférés dans les lieux ou réunions publics » ; si la preuve était rapportée de l’intention de leur auteur qu’ils soient entendus au-delà d’un cercle de personnes unies entre elles par une communauté d’intérêts, laquelle est exclusive de toute publicité. La Cour d’appel de Paris a confirmé le défaut de publicité de l’injure en énonçant que « les propos retenus comme injurieux ont été tenus en marge d’une manifestation réservée aux seuls militants de l’UMP mais ouverte à la presse, la présence de cette dernière n’ôtant pas, à elle seule, à la réunion, ni au lieu où elle se tenait, leur caractère privé ». La Cour d’appel de Paris a infirmé le jugement du Tribunal de grande instance de Paris en énonçant que l’action du MRAP n’était pas recevable. La cour rappelle l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, qui dispose que : « Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts (…) de combattre le racisme ou d’assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par les articles 24 (alinéa 8), 32 (alinéa 2) et 33 (alinéa 3), de la présente loi, ainsi que les délits de provocation prévus par le 1° de l’article 24, lorsque la provocation concerne des crimes ou délits commis avec la circonstance aggravante prévue par l’article 132-76 du code pénal ». Certes, le MRAP remplit bien les conditions posées pour une association pour exercer les droits de la partie civile dans le cas du délit d’injure publique de l’article 33 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881. Mais l’article 624-4 de Code pénal, qui prévoit et réprime l’injure non publique, n’entre pas dans le champ d’application de l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881. Il n’y est en effet pas visé. En raison du principe d’interprétation stricte de la loi pénale, la Cour d’appel de Paris n’a pu que constater l’absence de capacité à agir du MRAP, et, faute de recevabilité de sa constitution de partie civile, le débouter de toutes ses demandes. Le MRAP a aussitôt annoncé qu’il envisageait de se pourvoir en cassation et de déposer une question prioritaire de constitutionnalité. CA Paris 15-9-2011 n° 10-06226 Brice Hortefeux c./ MRAP

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Vers une identification des blogueurs ?

Pour faciliter l’identification des éditeurs de sites de communication en ligne, en particulier des « blogueurs » professionnels et non professionnels, une proposition de loi  a été déposée au Sénat. Le cadre juridique des blogs a été posé en juin 2004 par la LCEN qui prévoit l’obligation pour les services de communication au public en ligne, de diffuser une notice légale ou, à défaut, en cas de site « personnel », de donner les informations d’identification à l’hébergeur. Mais ce cadre relativement léger a été fixé à une époque où les blogs ne représentaient qu’un phénomène marginal. Or depuis juin 2004, ils se sont multipliés de façon exponentielle, en même temps que les débordements en matière de liberté d’expression. Bien que responsable pénalement et civilement des propos qu’il tient et de l’ensemble des éléments qu’il édite, le blogueur non professionnel n’a pas les mêmes obligations que le blogueur professionnel en ce qui concerne son identification. La loi lui permet en effet de préserver son anonymat en se limitant à tenir à la disposition du public les éléments d’identification de l’hébergeur du blog à qui il doit, bien entendu, transmettre ses coordonnées personnelles. De fait, cela ne facilite pas l’exercice concret du droit de réponse des personnes nommément mises en cause par des auteurs anonymes dont les données d’identification sont incomplètes, voire erronées, l’hébergeur n’ayant pas d’obligation de les contrôler. Face à la multiplication des sites et des propos litigieux que peuvent contenir les blogs, le Sénat propose d’étendre aux éditeurs non professionnels de sites internet, et en particulier aux « blogueurs », les obligations d’identification requises des professionnels. L’assimilation de l’éditeur non professionnel au directeur de la publication aurait pour corollaire d’introduire explicitement l’obligation de fournir une adresse électronique pour faciliter le droit de réponse. Cela mettrait ainsi un terme à la distinction devenue, en pratique, largement inopérante entre éditeurs de sites professionnels et non professionnels. PLO Sénat 423 du 3-5-2010

société américaine
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Définition d’un service de presse en ligne

L’article 27 de la loi Création et Internet du 12 juin 2009 a introduit dans la loi du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse une définition du « service de presse en ligne ». Le service de presse en ligne est défini comme étant « tout service de communication au public en ligne édité à titre professionnel par une personne physique ou morale qui a la maîtrise éditoriale de son contenu, consistant en la production et la mise à disposition du public d’un contenu original, d’intérêt général, renouvelé régulièrement, composé d’informations présentant un lien avec l’actualité et ayant fait l’objet d’un traitement à caractère journalistique, qui ne constitue pas un outil de promotion ou un accessoire d’une activité industrielle ou commerciale ». Le décret n°2009-1340 du 29 octobre 2009 vient préciser les critères auxquels doivent répondre les éditeurs pour être qualifiés d’éditeur de service de presse en ligne. Le décret énumère onze critères : le service de presse en ligne doit satisfaire aux obligations de l’article 6-III 1° de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (notice légale) ; le service de presse en ligne doit répondre aux obligations de l’article 93-2 de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle (désignation d’un directeur de la publication); le service de presse en ligne doit être édité à titre professionnel ; le service de presse en ligne doit offrir, à titre principal, un contenu utilisant essentiellement le mode écrit, faisant l’objet d’un renouvellement régulier et non pas seulement des mises à jour ponctuelles et partielles. Tout renouvellement doit être daté ; le service de presse en ligne doit mettre à disposition du public un contenu original, composé d’informations présentant un lien avec l’actualité et ayant fait l’objet, au sein du service de presse en ligne, d’un traitement à caractère journalistique, notamment dans la recherche, la vérification et la mise en forme de ces informations ; le contenu publié par l’éditeur du service de presse en ligne doit présenter un caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée : instruction, éducation, information, récréation du public ; le contenu publié par l’éditeur du service de presse en ligne ne doit pas être susceptible de choquer l’internaute par une représentation de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence ou présentant la violence sous un jour favorable ; le service de presse en ligne ne doit pas avoir pour objet principal la recherche ou le développement des transactions d’entreprise commerciale, industrielle, bancaire, d’assurances ou d’autre nature, dont il serait en réalité l’instrument de publicité ou de communication, et ne doit pas apparaît pas comme étant l’accessoire d’une activité industrielle, artisanale, commerciale ou de prestation de service autre que la mise à disposition du public d’informations ayant fait l’objet d’un traitement à caractère journalistique. Dans tous les cas, ne peuvent être connus comme des services de presse en ligne, les services de communication au public en ligne dont l’objet principal est la diffusion de messages publicitaires ou d’annonces, sous quelle que forme que ce soit ; l’éditeur du service de presse en ligne doit avoir la maîtrise éditoriale du contenu publié à son initiative ; sur les espaces de contribution personnelle des internautes, l’éditeur doit mettre en œuvre les dispositifs appropriés de lutte contre les contenus illicites. Ces dispositifs doivent permettre à toute personne de signaler la présence de tels contenus et à l’éditeur de les retirer promptement ou d’en rendre l’accès impossible ; pour les services de presse en ligne présentant un caractère d’information politique et général, l’éditeur doit employer, à titre régulier, au moins un journaliste professionnel. Les éditeurs réunissant ces conditions pourront bénéficier de l’exonération de la taxe professionnelle et accéder au bénéfice des provisions pour investissement, ainsi qu’au fonds d’aide au développement des services en ligne des entreprises de presse créé par le décret n° 2004-1313 du 26 novembre 2004. Décret 2009-1340 du 29-10-2009

Presse et communication numérique

La diffamation par télécopie

Diffamation La diffamation par télécopie Condamné pour diffamation publique envers un particulier, un chirurgien avait formé un pourvoi en cassation, au motif que l’utilisation qu’il avait du fax ne pouvait donner, de facto, un caractère public à la diffamation. La Cour de cassation a entendu sa cause, en rappelant l’assimilation de l’envoi d’une télécopie à une correspondance privée. En l’espèce, elle a considéré que la télécopie était un moyen de communication utilisé pour transmettre des messages à caractère privé à un public de professionnels de santé. En outre, la cour a complété la notion de publicité en attachant une importance à la composition du groupe relevant que lorsque les écrits litigieux sont portés à la connaissance d’une communauté homogène de personnes partageant un même intérêt, le caractère de publicité fait défaut. Cass., crim, 19 juin 2001

responsabilité pénale
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Diffamation:Le TGI est compétent pour les délits de presse

Le tribunal de grande instance est compétent pour tous les délits de presse. Le décret du 29 décembre 2009 a modifié le Code de l’organisation judiciaire et expressément attribué aux tribunaux de grande instance une compétence exclusive pour connaître des « actions civiles pour diffamation ou injures publiques ou non publiques, orales ou verbales » (article R. 211-4, 13° du Code de l’organisation judiciaire). Ainsi, toutes les actions menées en matière de diffamation ou injure devront l’être devant le tribunal de grande instance, quel que soit le quantum des dommages et intérêts en matière civile. Ce décret s’applique à compter du 1er janvier 2010, sans rétroactivité aux procédures pendantes à cette date. Le juge de la mise en état de la 17ème chambre du Tribunal de grande instance de Paris a déjà eu l’occasion d’appliquer cette nouvelle disposition et a rendu, le 13 janvier 2010, une ordonnance aux termes de laquelle a été rappelé que : « le décret 2009-1693 du 29 décembre 2009 relatif à la répartition des compétences entre le tribunal de grande instance et le tribunal d’instance a attribué compétence exclusive au tribunal de grande instance, s’agissant des « actions civiles pour diffamation et pour injures publiques ou non publiques, verbales ou écrites », sans plus distinguer selon que les délits avaient été ou non commis par voie de presse (article R 221-4 du code de l’organisation judiciaire dans sa rédaction issue de ce décret) ». Décret n° 2009-1693 du 29 décembre 2009 (Mise en ligne Janvier 2010) Autres brèves Droit de réponse en ligne et directeur de la publication (Mise en ligne Mai 2009) Un nouvel accès à un contenu existant ne vaut pas nouvelle publication (Mise en ligne Mars 2009)  

Pas d’autorisation perpétuelle
Presse et communication numérique

La protection des droits des journalistes de l’audiovisuel

Le Syndicat national des journalistes (SNJ) a fait citer à comparaître devant le tribunal de grande instance de Strasbourg la société Plurimedia, opérateur de télécommunications qui diffuse des émissions de télévision sur Internet. Des journalistes indépendants ayant également attrait la société Plurimedia devant le juge des référés commerciaux en raison de la diffusion d’un journal Les Dernières Nouvelles d’Alsace sur Internet, la jonction des deux procédures a été ordonnée. Les parties demanderesses, si elles reconnaissent au journal la propriété des droits sur une oeuvre collective, évoquent le respect des dispositions du contrat de travail et de la convention collective régissant leur profession, aux termes desquels la cession n’est consentie que pour la première publication et pour les supports expressément stipulés. En conséquence, la cession des droits en vue d’une diffusion sur un support non prévu au contrat impose à l’organe de diffusion de solliciter le consentement préalable de l’auteur et l’insertion de dispositions complémentaires au contrat. Concernant FR 3, les requérants soutiennent que « la presse audiovisuelle donne lieu à une oeuvre collective« , dont la cession est soumise aux mêmes conditions que celles invoquées pour le journal Les Dernières Nouvelles d’Alsace. Estimant que leurs droits moral et pécuniaires sur les oeuvres diffusées ont été méconnus, elles sollicitent du tribunal qu’il soit fait interdiction sous astreinte à la société défenderesse de diffuser les articles litigieux sur internet. Le tribunal, considérant que les journalistes « ne pouvaient céder le droit d’exploiter l’oeuvre sous une forme non prévisible et non prévue à la date du contrat », a jugée illicite la cession des émissions déjà diffusées par FR3, en l’absence de stipulation contractuelles expresses. Concernant Les Dernières Nouvelles d’Alsace, le tribunal a rappelé que « le journaliste limite la cession de son droit d’auteur à une première publication » et que « la reproduction de l’oeuvre d’un journaliste professionnel dans un autre périodique est soumise à autorisation », matérialisée par la signature d’une convention prévoyant les conditions dans lesquelles la reproduction est consentie. Ces dispositions s’appliquant à la diffusion d’articles sur internet, le juge des référés a accueilli favorablement les arguments des requérants et prononcé l’interdiction de diffuser sur internet les articles des Dernières Nouvelles d’Alsace et les émissions de FR3 jusqu’à l’obtention du consentement des auteurs. TGI Strasbourg du 3-2-1998

Télécoms Juillet
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La prescription des infractions de presse commises sur internet

La fameuse prescription de trois mois concernant les délits de presse prévue par l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 pose nombre de problèmes, à différents degrés, en ce qui concerne les sites internet qui diffusent des textes à caractère raciste. Le point de départ de l’action doit être fixé à la date du premier acte de publication puis, en cas de nouvelle publication, la prescription doit être fixée au jour de chacune des publications nouvelles. En décidant de rendre son site accessible par une nouvelle adresse, plus courte, le prévenu avait créé un nouveau mode d’accès et qui plus est permettant d’accroître le nombre d’internautes. Les textes sont alors considérés comme réédités, la prescription de l’action publique n’est donc pas acquise. Adoptant une attitude aussi sévère à l’égard des « délinquants du monde de la presse», la loi Perben II a rallongé le délai de prescription à un an à compter de la première publication pour les auteurs de propos racistes ou négationnistes. CA Paris 11e ch. sect. B. 29 janvier 2004

paquet télécom
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Les modalités du droit de réponse sur internet

Le décret du 24 octobre 2007 apporte des précisions indispensables à l’exercice du droit de réponse sur internet. Il est toutefois porteur en lui-même d’un certain nombre d’interrogations voire de difficultés quant à sa mise en oeuvre effective. Rappelons à cette occasion que les principales nouveautés de cette loi visent à consolider la lutte contre la contrefaçon en renforçant les procédures accélérées devant les juridictions civiles, en facilitant l’obtention d’informations sur les réseaux de contrefaçon et en améliorant la réparation du préjudice des victimes de la contrefaçon. Il précise les modalités du droit de réponse au bénéfice des personnes nommées ou désignées dans un service de communication au public en ligne institué par l’article 6 IV de la loi du 21 juin 2006 dite loi pour la confiance dans l’économie numérique. La demande d’exercice du droit de réponse, le cas échéant de suppression ou de rectification, est à adresser par lettre recommandée avec AR au directeur de publication du service en cause.Ce dernier est tenu d’insérer gratuitement dans les 3 jours suivant sa réception, la réponse, sous peine d’une amende de 3 750 euros. La demande doit indiquer notamment : les références du message, le nom de son auteur s’il est indiqué, sa nature (écrit, son ou images), la mention des passages contestés et la teneur de la réponse sollicitée. La réponse quant à elle, doit prendre la forme d’un écrit limité à la longueur du message litigieux, être mise à la disposition du public dans des conditions similaires à celles de ce dernier et durant la même période. Le présent décret soulève toutefois des difficultés. En particulier, son application pourrait se heurter au droit à l’anonymat des éditeurs personnes physiques de sites internet.Dans ce cas là il faudra sans doute s’adresser aux hébergeurs qui en application de ce décret ont l’obligation, dans un délai de 24 heures, sous peine d’une contravention de 4e classe, de transmettre la demande de droit de réponse à l’éditeur conformément aux éléments d’identification personnelle qu’ils détiendraient. En outre, le droit de réponse ainsi institué risque de voir son domaine d’application réduit car il ne s’applique pas lorsque le demandeur peut formuler directement des observations sur le service de communication au public en ligne. Décret 2007-1527 du 24-10-2007

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